James Lee Burke : Prisonnier du ciel

Genre : Polar humide du Bayou

JL Burke
JL Burke

8/10

Dave est un Cajun de Louisiane qui boit du Dr Pepper. Alcoolique désormais abstinent et abonné aux AA, il traîne un passé de flic qui en a bavé et d’ancien du Vietnam, dans le bayou en vendant des appâts pour la pêche et en louant des barques.

Secondé par Batist, le « neg’ » qui baragouine un melting pot de franglais des îles, et aimé par Annie, Dave a trouvé un équilibre entre al mer et la Nouvelle Orléans.

Jusqu’au crash de ce petit avion de tourisme qui lui laisse Alafair, petite fille mexicaine qu’il sauve de la noyade, et une enquête pas claire ou surnage les services du gouvernement, l’immigration et la pègre.

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Baiser

Chaque fois que j’avais touché ma jeune amie, le contact avait été électrique. J’ai déjà décrit cela et en parler m’a toujours gêné , mais j’attribuais ce phénomène à son… à une aura… à une forte personnalité. C’était une chose réelle, et pas une métaphore. Mais je n’avais jamais senti une telle décharge d’électricité entre nous.
Pendant une seconde, je restai passif, recevant son baiser plus que je ne le partageais. Mais alors sa chaleur et son insistance triomphèrent de la pensée, triomphèrent du doute, triomphèrent de tous mes autres sens dans les nuances de ce verbe, et je lui rendis son baiser, mettant mes bras autour d’elle pour l’attirer de plus près ; alors elle glissa ses bras sous les miens et fit courir ses doigts vigoureux le long de mon dos. Cela faisait cinq ans, pour elle, qu’Enée m’avait donné ce baiser d’adieu, au bord du fleuve de l’ancienne Terre ; il avait été pressant, électrique, plein de questions et de messages, mais c’était tout de même le baiser d’une fille de seize ans. Celui-là, c’était le baiser chaud, mouillé, bouche ouverte, d’une femme, et je réagit aussitôt.
Nous nous sommes embrassés pendant une éternité. J’étais vaguement conscient de ma nudité et de mon excitation comme d’une chose qui aurais dû m’embarrasser, mais c’était secondaire par rapport à ce baiser brûlant, insistant, qui ne voulait pas cesser. Quand finalement nos lèvres se séparèrent, presque enflées, presque endolories, pleines du désir d’être encore embrassées, nous couvrîmes de baisers nos joues, nos paupières, nos fronts, nos oreilles. Je baissait la tête et embrassai le creux de sa gorge, son pouls contre ma bouche, et je humai l’odeur parfumée de sa peau. Toujours à genoux, elle se cambra un peu afin que ses seins frôlent ma joue. Je refermai ma main sur l’un d’eux et baisai le mamelon presque avec respect, Enée prit ma nuque dans la paume de sa main. Je sentais son souffle sur moi, s’accélérer, tandis qu’elle se penchait vers moi.

Dan Simmons ; L’éveil d’Endymion Robert Laffont, Ailleurs et demain, 1997, p.351

Dieu

« Les théologiens et les philosophes, qui font de Dieu l’auteur de la nature et l’architecte de l’univers, nous le font paraître absurde et méchant. Ils le disent bon, parce qu’ils le craignent, mais ils sont forcés de convenir qu’il agit de façon atroce. Ils lui prêtent une malignité rare même chez l’homme. Et c’est par là qu’ils le rendent adorable sur la terre. Car notre misérable race ne vouerait pas un culte à des Dieux justes et bienveillants dont elle n’aurait rien à craindre ; elle ne garderait point de leur bienfaits une reconnaissance inutile. Sans le purgatoire et l’enfer, le bon Dieu ne serait qu’un pauvre sire. (…) Epicure à dit : « Ou Dieu veut empêcher le mal et ne le peut, ou il le peut et ne le veut, ou il ne le peut ni ne le veut, ou il le veut et le peut. S’il le veut et ne le peut, il est impuissant ; s’il le peu et ne le veut, il est pervers ; s’il le peut ni ne le veut, il est impuissant et pervers ; s’il le veut et le peut, que ne le fait-il, mon père ? … « Monsieur, répondit le religieux, il n’y a rien de plus misérable que les difficultés que vous soulevez. Quand j’examine les raisons de l’incrédulité, il me semble voir des fourmis opposer quelques brins d’herbe comme une digue au torrent qui descend la montagne. Souffrez que je ne dispute pas avec vous : j’y aurez trop de raisons et trop peu d’esprit. Au reste, vous trouverez votre condamnation dans l’abbé Guénée et dans vingt autres. Je vous dirai seulement que ce que vous rapportez d’Epicure est une sottise : car on y juge Dieu comme s’il était homme et en avait la morale. Eh bien ! Monsieur, les incrédules, depuis Celse jusqu’à Boyle et Voltaire, ont abusé les sots avec de semblables paradoxes. »

Anatole France, Les Dieux ont soif, p.61 et 146